Les armes d'hast

Les armes d'hast

Qu'elles piquent, taillent ou choquent, les armes d'hast sont les partenaires indispensables des batailles médiévales
Par Pierre Rousset
tiré du magazine Histoire Médiévale

En préambule, je m'adresse aux âmes sensibles qui seraient horrifiées par les armes d'hast. Je leur accorde bien volontiers que ces pointes et ces tranchants sont impressionnants, tout à fait capable de provoquer d'horribles blessures tant, hélas, aux chevaux qu'aux hommes ce sont des armes de guerre. Mais je ne tolèrerai aucune remarque désobligeante de la part de gens qui ont vécu au XXe siècle : siècle terrifiant s'il en fut oncques.

Du bon usage de l'arme d'hast...

Dans la plupart des cas, les batailles médiévales ne duraient que quelques heures, parfois une ou deux journées. Le vainqueur était celui qui restait maître du champ de bataille. Quel qu'il ait été, franc, germain, musulman ou autre, lances, vouges, épieux, guisarmes se trouvaient au coeur de la mêlée. Un seul coup d'épieu pouvait avoir de terribles conséquences, surtout si la victime était Pierre de Castelnau, légat du Pape... Ce meurtre, non élucidé, provoqua une sainte colère du pape Innocent III qui lança la Croisade contre le Languedoc. Je cite la Canson de la Crusada : « E l ferit per la esquina am son espeut trencant » (Et le frappe au dos avec son épieu tranchant). Une charge de chevaliers, armés de lances, peut changer le cours de l'Histoire, un funeste jour de septembre 1213, à Muret (Pierre II, roi d'Aragon, y a été tué en combat par les croisés menés par Simon de Monfort, une charge de cavalerie leur ayant permis d'investir le camp des défenseurs languedociens et de leurs alliés). La fleur de la chevalerie française peut se trouver empêtrée dans des marais boueux et se faire tailler en pièces, à coups de guisarmes et de godendacs, par les milices flamandes, comme à Courtrai en 1302. L'événement est resté dans l'Histoire sous le nom de « bataille des Eperons d'Or » en souvenir des éperons dorés placés en ex-voto dans la cathédrale de Courtrai. Même si, à Crécy ou Azincourt, l'ennemi doit sa victoire à la grêle de flèches galloises, comme dans toutes les batailles médiévales, l'arme d'hast a joué un rôle essentiel.
Elle est omniprésente depuis que l'Homme s'est trouvé en position de combattre. Le silex taillé, ligaturé au bout d'une branche a été précédé par une branche d'arbre, à la pointe durcie au feu. Ce type d'arme monoxyle est utilisé par Ulysse pour aveugler le Cyclope Polyphème -cet acte lui vaudra la vengeance de Poseïdon... mais ceci est une autre histoire, déjà contée par Homère.
Les noms de ces armes sont parfois mal définis, parfois intraduisibles, parfois ambivalents plusieurs noms désignant la même arme ou, du moins, des armes très proches par leur forme et leur usage. L'orthographe peut varier. Le vocabulaire des chroniqueurs médiévaux, souvent en latin, manque parfois de précision, tout comme les gens de notre époque confondent pistolet et revolver... ou emploient l'expression « le doigt sur la gâchette... ».

Principes de l'arme d'hast


Etymologiquement, le terme « hast » provient du latin hasta qui signifie « lance » . En fait, l'expression « armes d'hast » désigne toutes les armes munies d'une hampe. Au risque d'allumer une querelle linguistique, j'ai dit une hampe, je répète : une hampe. Un outil, lui, a un manche... Cette hampe est protégée contre les armes tranchantes par deux ou quatre attelles d'acier qui, en outre, permettent la bonne tenue du fer sur le bois. Les batailles ont lieu en plein jour mais, parfois, sur le bois d'une hallebarde, quelques clous biens placés permettent, même dans l'obscurité, de savoir si le tranchant ou le croc est face à l'adversaire.
Sur les armes que j'ai examinées, la qualité de l'acier est toujours remarquable, quelle que soit la date de fabrication. Frappé à chaud par l'armurier, le poinçon de forge est la marque de fabrique mais il représente parfois la ville et non le forgeron d'armes. En outre, toutes les armes ne sont pas poinçonnées et tous les poinçons ne sont pas inventoriés ....
A l'exception de la lance et de la pique, qui possèdent des hampes cylindriques, et de quelques épieux dont la hampe de section ronde ou ovoïde est agrémentée de clous ou de sangles de cuir croisées, les hampes sont en règle générale de section octogonale, représentant un carré ou un rectangle aux angles rognés. Cette forme permet une bonne prise en main, l'arme ne « tournant » pas dans la paume. Le manche d'un marteau est de section ovale mais le maillet de sculpteur, qui doit tourner dans la main, a un manche rond... Habituellement, le bois est du frêne, fendu et non scié, le fil du bois allant du fer au talon ; ces hampes sont ainsi très résistantes, à la compression et à la flexion. Ce bois est bien choisi, sans noeud, sans point faible, comme pour un arc monoxyle. II est terminé par une douille de fer : le talon, qui permet de s'arc-bouter au sol pour « recevoir » la cavalerie, le fer dans le poitrail du cheval !
En dépit de leur origine étymologique, la plupart des armes d'hast sont des armes de piéton, cette vile piétaille, méprisée par les chevaliers qui, eux, emploient la lance, une arme noble, utilisée à cheval. Certaines armes sont le résultat de l'évolution d'un outil. La parenté entre l'arme et l'outil est fréquente, mais elle n'est pas toujours aussi évidente qu'entre la hache à bois et la hache d'arme. C'est toujours l'outil qui se transforme en arme.
Ces armes sont évidemment destinées à frapper un adversaire, mais l'équipement défensif de celui-ci va faire évoluer l'arme, au cours des siècles. D'autres armes, souvent munies de longues lames, sont destinées à blesser les chevaux. Enfin, des armes, munies de crocs, sont destinées à désarçonner l'adversaire. Les armes les plus évoluées permettent plusieurs de ces utilisations.
Compte tenu de la diversité des armes d'hast, je ne prétends pas faire un inventaire exhaustif mais je vais essayer de vous présenter un inventaire aussi complet que possible.

Typologie des armes d'hast


Les armes que je vais décrire datent principalement des XIVe s. et XVe siècles. Ce sont celles que les artistes médiévaux contemporains de leur période d'utilisation ont le plus fidèlement restituées ; elles ont également mieux résisté au temps que leurs antécédents. Même dans les musées les plus importants, les armes conservées en très bon état sont rarement antérieures au XIVe siècle, consolons-nous donc en admirant le savoir-faire des armuriers du XVe siècle. Les sources permettant d'étudier ces armes présentent des intérêts divers. Les artistes ont souvent représenté des chevaliers ou des soldats ; sculptures, peintures et enluminures montrent ainsi leurs armes, parfois d'ailleurs avec des proportions faussées. L'archéologie exhume des pièces mais, même rouillées, ces armes ont gardé leurs dimensions d'origine. Outre les collections du Moyen Âge, les musées présentent dans leurs vitrines des pointes de lance, en bronze, en parfait état, datées de l'Âge de Bronze et dont la forme est parfois la même que celle des armes médiévales, à peu de chose près. Enfin, certaines armes se trouvent dans des col-lections privées, j'ai néanmoins pu les manipuler pour les étudier.
P. R.

La Canson de la Crusada est une longue chronique (10.000 vers) rédigée en occitan. Elle a été commencée par Guilhem de Tudela, favorable aux Croisés. Il décéda avant de la terminer, ce qui a permis à un troubadour anonyme de la continuer, pour les 2/3 restants. Ce troubadour, plus talentueux, catholique lui aussi, mais sans fanatisme, est favorable au comte de Toulouse. La chronique s'arrête après le sac de Marmande par le prince Louis, le futur Louis VIII, et avant le siège de Toulouse, en juin 1219. Il est vraisemblable que ce troubadour, contemporain des événements, a vécu dans l'entourage de Raymond VII de Toulouse. La chronique est riche de nombreux détails sur les combats, par exemple : les Toulousains frappent les croisés aux jambes, non protégées par le haubert ; les pointes ferrées des peignes de cardeurs de lin sont utilisées comme pointes de flèches ....

LES ARMES D'HAST A UNE FONCTION PRINCIPALE

Armes d'estoc


Attention : c'est pointu, ça pique...
La lance, connue depuis l'Antiquité, doit être citée en priorité. Je parle de la lance de bois et de métal, et non de la « lance » en tant que groupe de combattants. L'angon mérovingien est comparable au pilum romain. Le pilum est une arme d'hast tout à fait particulière, elle est surtout destinée à être piquée dans le bouclier adverse pour obliger l'ennemi à se découvrir. La framée mérovingienne est une lance, fine, élancée, de la hauteur d'un homme. Le javelot ou dard, utilisé par les Gascons, est souvent cité dans la Canson de la Crusada. Le bois de la lance de cavalerie suit l'évolution de l'armure. Le crochet de lance ne peut se trouver que sur l'armure de plates. Le haubert de maille ne permet pas cet accessoire. Une large rouelle protège la main. La lance, arme noble, est l'arme des tournois. En règle générale, il y a deux types de fer pour la lance de tournoi : une pointe très courte, pyramidale, ou le rochet à trois pointes. Le rôle offensif n'est pas le but recherché. De même, le bois de peuplier permet de « rompre une lance » sans trop de danger. De forme assez allongée aux IX et Xe siècles, l'épieu devient ensuite plus massif, parfois de grande dimension. En outre, une différence apparaît entre l'épieu de guerre, muni d'attelles pour protéger le bois contre les armes tranchantes, et l'épieu de chasse, muni d'une large lame très tranchante. Ce dernier possède toujours un élément destiné à empêcher le sanglier de blesser le chasseur. Cet accessoire limite l'enfoncement du fer. Il s'agit soit d'un ergot forgé avec la douille soit, le plus souvent, d'un morceau de métal ou de corne de cerf, la billette. Au XVe siècle, la longue pique (4 à 6 mètres) oubliée depuis la sarisse des Grecs d'Alexandre le Grand, va revenir à la mode avec les piquiers suisses et plus tard, les lansquenets allemands. Les carrés de piquiers feront la loi sur le champ de bataille jusqu'à la bataille de Rocroi, gagnée sur les Tercios espagnols par le Grand Condé, en 1643, première année d'un long règne. La pointe de la pique adopte diverses longueurs et formes, parfois carrée, comme un gros carreau d'arbalète étiré, et plus souvent très proche d'une pointe de lance, avec souvent des attelles, inutiles sur la lance. La pointe de la lance arrive au galop d'un cheval alors que la pique est maniée par un fantassin : il est donc possible de la couper d'un coup d'épée sur le bois, en arrière du fer. Les piquiers doivent « se serrer les coudes » pour éviter ce dangereux désagrément. L'angon, l'épieu, la lance, la pique sont des armes d'hast destinées à percer, soit au choc, soit en exerçant une poussée. La blessure est élargie par le tranchant symétrique dont la forme évoque une feuille de laurier.
Deux armes ont une longue lame tranchante : la pertuisane, apparue en Italie au XVe siècle, connue sous le nom de partizane, possède un long tranchant symétrique ; la langue de boeuf est à rapprocher de ce même type d'arme à la pointe et au tranchant symétriques mais avec une forme comparable aux lames d'épées à la colichemarde. Il ne faut pas oublier une arme destinée à percer, et uniquement à percer: l'ahlspiess, une arme allemande du XVe siècle. C'est une longue pointe à section carrée. Une rouelle, indispensable pour limiter l'enfoncement, protège en plus la main, sa hampe est assez courte.

Armes de choc

Attention ça cogne...
Le fléau du moissonneur va donner le fléau d'arme. La partie articulée amplifie l'effet de choc. Elle est d'abord en bois, cerclé de fer, avec des attelles. Plus tard, ces parties métalliques seront munies de pointes. Le fléau d'arme se perfectionne en perdant son aspect d'outil agricole : outre les attelles, il comprend une chaîne terminée par une boule munie de pointes, parfois 2 ou 3 chaînes terminées par des pointes. Ces chaînes, en s'enroulant autour d'une arme d'hast, permettent de désarmer un adversaire. Le choc de la boule de ce type de fléau d'arme est terrible. Selon la longueur du bois, cette arme se manie à deux mains, ou d'une seule. La masse d'arme, citée dans la Canson de la Crusada, est une évolution du tinel ou bâton ferré. Une sorte de tube de fer ou d'acier, muni d'ergots, avec une forte hampe de bois, permet de frapper des coups violents. Viollet-le-Duc décrit une arme de ce type moulée en bronze. La masse d'arme à ailettes, des XVe s. et XVIe siècles, est une évolution de ce type d'arme, mais avec deux différences importantes : le métal remplace le bois pour la hampe et l'arme est utilisée d'une seule main.
La plommée, à l'origine une sorte de maillet, en plomb, est efficace pour assommer ou briser des os, même sous un bon gambison. Le plomb se déformant au contact des armes, défensives ou offensives, il sera remplacé par du bronze, puis muni de pointes, en acier. En se perfectionnant, cette arme perd sa simplicité de fabrication et donc une partie de son intérêt. Parfois, elle est dessinée par les enlumineurs du XVe siècle.
Le marteau de forgeron va donner le marteau d'arme. Le marteau d'arme n'a pas cette surface plate pour enfoncer des clous mais son extrémité correspond soit à 4 fortes et courtes pointes, soit à une surface en pointes de diamants, l'autre extrémité du fer étant souvent un bec de corbin (forte pointe dont la forme évoque le bec d'un corbeau). Cette arme est également souvent représentée dans les enluminures du XVe siècle.
Le morgenstern (étoile du matin) est une grosse massue à deux mains, munie de nombreuses pointes et d'un estoc. Le bois est taillé à 8 pans pour la partie offensive et rond pour le reste de la hampe. Les pointes sont faciles à forger. La particularité de ce type d'arme réside dans une astuce de fabrication toutes les pointes sont verrouillées par l'estoc ; elle ne sont pas simplement piquées dans le bois comme un vulgaire clou, ce qui leur permet de bien tenir au choc. La simplicité de fabrication de cette arme lui a permis de traverser les siècles, du Moyen Âge au XIXe siècle. Son ultime avatar: les massues cloutées des « nettoyeurs de tranchées » de la Guerre de 14-18.

Armes de taille


Attention, ça coupe...
Parallèlement aux haches d'armes datant du XIIe ou du XIIIe siècle, la Tapisserie de Bayeux montre un autre type de hache: la hache saxonne. Par ailleurs, Froissart cite en particulier des haches à la bataille de Cocherel et notamment dans les mains du Captal de Buch. Ce qui n'empêche pas ses ennemis de le faire prisonnier ! Enfin, il y a une arme, allemande, d'une forme particulière, apparentée aux haches mais munie d'une pointe. C'est une hache d'arme allemande du XVe siècle, encore en usage au siècle suivant. La hache d'arme a une longue carrière militaire ; avec sa simplicité d'emploi, son efficacité, elle est utilisée durant tout le Moyen Âge. Mais, les autres types d'armes d'hast, en se perfectionnant, ont renvoyé la hache vers son usage normal : couper du bois.

LES ARMES D'HAST À DEUX FONCTIONS PRINCIPALES


Armes d'estoc et de taille

Atention : ça pique et Ça taille...
Les plus élégantes des armes d'hast de cette catégorie sont les corsèques du XVe siècle. Originaires d'Italie, ces armes auraient été utilisées par des mercenaires corses. Cette explication étymologique est donnée avec réserve... Il s'agit de grands tridents, à lames tranchantes et pointues. On distingue trois types principaux : la corsèque chauve souris, la corsèque avec ses pointes latérales, recourbées vers le bas, pour désarçonner, et la corsèque avec les pointes latérales recourbées vers le haut, un peu comme le trident du Rétiaire des Jeux du Cirque de la Rome antique. Ce type d'arme, connue également sous le nom de roncone, peut atteindre de grandes dimensions.
La corsèque, l'épieu de guerre et la pertuisane sont des armes symétriques. Examinons maintenant les armes d'estoc et de taille asymétriques : elles sont nombreuses et variées.
Le ou la vouge, masculin ou féminin, constitue un type de cette catégorie d'armes d'hast. Evoquons d'abord le vouge français, une sorte de long et fort coutelas au bout d'une hampe, presque toujours avec une rouelle. La hampe est de longueur modérée. Les enluminures de la Guerre de Cent Ans nous en montrent quelques-uns. Cette arme est également appelée couteau de brèche et parfois plus connue sous ce nom (voir Histoire Médiévale n° 31).
Une autre arme d'hast à deux fonctions principales est le godendag flamand: c'est la traduction approximative de « bonjour ». Je tiens à souligner l'humour flamand qui consiste à dire bonjour avec cet instrument tranchant, fait d'une forte lame, un coutre de charrue, sur une hampe. Cette arme lourde, d'un maniement particulier est flamande ; son existence se limite au XIVe siècle. Elle est d'ailleurs assez mal connue et sujette à discussion. Le coutre étant placé devant le soc de la charrue, c'est une lame épaisse qui se voit modifiée pour devenir une arme ou est spécialement forgée pour cet usage guerrier.
Le fauchart est apparenté à cette arme. II s'agit d'une sorte de faux placée dans l'axe du bois ; c'est probablement une évolution de la faux emmanchée à rebours (ou dahla virada) des révoltes paysannes, avec deux différences: le tranchant est concave sur la faux mais convexe sur le fauchart, la lame de la faux est tranchante comme un rasoir mais fragile alors que le fauchart n'a pas cette fragilité. Revenons maintenant au vouge lui-même. Cette sorte de hachoir est l'ancêtre de la hallebarde. Il comprend une lame munie de deux colliers de fixation, soudés à la forge, parfois munie d'un croc à l'arrière, la pointe n'étant pas toujours dans l'axe du bois. Le couteau à marc semble être son ancêtre. Pour les amateurs de reconstitution, c'est l'arme d'hast la plus facile à fabriquer... Le vouge va évoluer vers la hallebarde : muni d'un croc à l'arrière et forgé en plusieurs parties; lame, croc, attelles, sa pointe n'est pas encore dans le prolongement du bois. La hallebarde est forgée d'une seule pièce et son estoc se trouve dans le prolongement du bois. L'arme est mieux équilibrée. Parfois le tranchant est très légèrement oblique : lorsque le hallebardier frappe un « coup de hachoir » il risque moins de dévier ou de glisser sur une partie métallique. La hallebarde italienne, de forme très allongée, est intermédiaire entre la vouge, la guisarme et la hallebarde proprement dite. Elle est parfois appelée scorpion, probablement à cause du poinçon dont le dessin représente cet animal. Ce poinçon de forge se retrouve assez souvent sur les armes d'hast milanaises.

Armes diverses

D'autres armes s'avèrent difficiles à classer : elles piquent mais, parfois, servent à d'autres usages.
Ainsi, le marteau de Lucerne est un pic opposé à 4 pointes monté sur un estoc de longueur variable et de section carré. Le marteau d'arme français, appelé également hache noble, est une arme parfois représentée dans des gravures ou des enluminures montrant des combats en champs clos, tournois ou duels judiciaires ; elle peut être confondue, à tort, avec une hallebarde. Elle est munie d'une hache, mais le tranchant est parallèle au bois, et d'un court estoc. Le croc de la hallebarde est remplacé par un marteau en pointe de diamant, La hampe est plus courte que celle d'une hallebarde. Elle n'est pas forgée d'une seule pièce, comme une hallebarde, mais de plusieurs pièces assemblées. Elle peut être décorée dans le style gothique du XV siècle, avec un trilobe dans le plat de la hache et des attelles finement découpées, comme les boîtiers de moufle d'arbalète.
La fourche fière est une fourche de guerre. Ses usages sont multiples : les deux pointes sont menaçantes mais elle peut aussi servir à enfumer des assiégés avec de la paille humide ou bien servir à porter des fascines.
Citons encore quelques armes d'hast à fonctions diverses. Le happe-vilain (ou attrape-coquins) sert à capturer, il est utilisé en Allemagne, aux XVe et XVIe s., c'est un désarçonneur amélioré. L'anicroche qui est une arme assez fruste. Elle croche : c'est un croc à désarçonner. La saquebute et l'anicroche sont aussi des armes à désarçonner. Une saquebute est représentée par Albrecht Dürer dans sa gravure « Le Chevalier, la Mort et le Diable » dans la main du Diable (cette oeuvre date de 1513). Le brindestoc est une arme d'apparence inoffensive mais son aspect de bâton de pèlerin cache une ou trois pointes qui sortent par un mouvement vif, en utilisant la force centrifuge. Le plançon â picot est une arme mal connue, c'est probablement une longue pointe sur une hampe (peut-être l'ahlspiess allemand ou yawl pike anglais).
La serpe de bûcheron, d'élagueur ou de défricheur de forêts, va évoluer vers la guisarme. Cette arme d'hast médiévale est bien connue du grand public, Sa forme caractéristique est le résultat de l'allongement de la serpe, adaptée à un usage guerrier. Dans sa forme la plus élaborée, elle est munie de deux ergots symétriques, à la base du fer. Elle pique, elle taille, elle désarçonne. Dans une mêlée, c'est l'arme idéale du fantassin contre un cavalier. Connue au XIIIe siècle -elle est citée dans la Canson de la Crusada-, E. Viollet-le-Duc la fait remonter au début du XIIe siècle. Rendant les mêmes services que la guisanne, la hallebarde n'est apparue en Suisse qu'à la fin du XIVé siècle. Notons qu'il existe également une serpe de guerre : pas de doute, ce n'est pas un outil, de longues attelles sont inutiles pour couper des branches,

Par Pierre Rousset


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